4 Analyse de la performance educative par la segregation educative (enquete PISA)
Un
essai de définition du concept d’équité pour comprendre la justice sociale dans
le domaine de l’éducation, n’est pas simple. Il faut prendre en compte le fait
que toutes les différences ne sont pas des inégalités, et que toutes les
inégalités ne sont pas injustes. On peut reprendre la définition du rapport de
1996 du Conseil d’État français qui précise que « l’équité consiste en
l’occurrence à définir des critères de choix objectifs, de nature scientifique
ou personnelle, permettant d’affiner et en quelque sorte, d’humaniser
l’universalisme de l’égalité (1997, p. 63).
Il
est considéré par tous que les inégalités liées au niveau socioéconomiques de
départ créent des exclusions des plus défavorisés à l’entrée du système
scolaire. De ce fait, on souhaite les compenser pour avoir une meilleure
justice sociale. A partir de ce vœu pieu, comment peut-on compenser cette
injustice sociale ? « En jouant sur la motivation des élèves, sur
leurs capacités cognitives à l’entrée, sur le soutien familial, sur la qualité
des établissements et des enseignants ? » Et même si on arrive à
répondre à cette question, quels seraient les moyens mis en place ? Par
conséquent, on peut mieux ressentir le besoin de passer d’une logique d’égalité
de traitement à une logique d’égalité des résultats. D’où l’importance des
enquêtes internationales pour donner des indicateurs sur l’équité éducative.
Nous
allons essayer de comprendre comment sont construit les indicateurs d’équité du
GERESE (Groupe Européen de Recherche sur l’Équité des Systèmes Éducatifs) et
ensuite nous essayerons de mettre en relief les processus éducatifs
inéquitables que sont les mécanismes de ségrégation scolaire.
Les indicateurs en matière d’équité
Le
recours aux indicateurs pour déterminer une politique éducative nationale
était, avant, peu utilisées, mais aujourd’hui la plupart des pays européens
utilisent ces indicateurs en matière d’équité et ils ont même été incorporé aux
objectifs du Traité de Lisbonne en 2006.
La
construction des indicateurs va se baser sur différentes dimensions. Par
exemple, on va tenir compte de la notion de groupes sociaux qui peuvent être
facilement identifiables tel que filles et garçons, les étrangers et les
natifs, les catégories socioprofessionnelles des parents, dans cette dimension
l’individu en tant que tel ne peut rien y faire, il fait partie de ce
positionnement. Une autre dimension va être la prise en compte du seuil de
pauvreté établie par le pays, car considérée comme un seuil inacceptable
d’injustice. Enfin, on va tenir compte d’une dimension interne à l’école sur
les établissements, les enseignants et les résultats scolaires.
La
méthodologie suivie sera une définition de la notion de ségrégation et des
dimensions prisent en compte, sur la base de données internationales PISA 2006
(élève de 15 ans). A travers une comparaison entre les différents états avec un
focus sur les pays scandinaves qui apparaissent les moins ségrégationnistes.
Delvaux
(2005), définit la ségrégation comme la « traduction de différences
sociales dans l’espace, » en se positionnant sur le fait qu’elle « se
manifeste dès que les individus, classés par la société dans des catégories
sociales distinctes, dotées d’une valorisation sociale différenciée, se
trouvent séparés dans l’espace et sont ainsi amenés à peu se côtoyer » (p.
276). Les espaces sociaux, ici sont les écoles qui vont être l’unité d’analyse.
Afin de mieux comprendre, nous reprendrons la distinction ségrégationniste de
Demeuse et Baye (2005), qui parlent de ségrégation académique des lèves (taux
de retard e réussite inégale aux différentes épreuves) et de ségrégation
sociale, en fonction des caractéristique non scolaires des élèves (sexe,
nationalité, niveau socioéconomique...).
Les résultats
Dans
un premier temps, on va se focaliser sur la ségrégation académique. Les six
premières colonnes du tableau s’intéressent aux élèves très faibles afin de
donner des informations sur les individus sous un seuil jugé inacceptables. Les
données de la colonne 5 indiquent qu’il faudrait déplacer 30 % des élèves
finlandais issus du groupe des 10 % les plus faibles (1er décile) en
sciences si l’on voulait une répartition plus proportionnelle dans les
différentes écoles du pays (c’est à dire d’élèves faibles dans chaque école).
Tandis que pour la Norvège, cela remonte à 37 % et pour la Suède à 36 %. A
titre de comparaison, la France est située à 59 %, ce qui démontre sa forte
ségrégation scolaire et donc son iniquité. Face à des pays nordiques dont le
pourcentage est de moitié moins important que celui de la France ou de
l’Allemagne.
La
colonne 6 offre le même genre d’information (10 % des plus faibles) mais cette
fois-ci, elle se base par niveau à atteindre, entre autres ici c’est le niveau
2 sur les 6 de PISA. Cette fois, la Finlande fait beaucoup moins bien que les
autres pays nordiques tel que la Norvège et la Suède, respectivement : 43
%, 27 % et 29 %. La France se positionne à 52 %, et l’Allemagne à 51 %. Les
quatre premières colonnes fournissent les mêmes informations mais basées sur la
lecture et les mathématiques.
Les
colonnes 11, 12 et 13 présentent le décile le plus faible, c’est à dire les 10
% d’élèves les plus faibles et là encore la ségrégation académique est peu
importante pour la Finlande puisque sa
moyenne du 1er décile est de 413. Tandis que pour la Norvège, il est
de 301 et la Suède, il est de 336. La France a une moyenne de 300. De ce fait,
ce qu’on peut en retirer, c’est que la Finlande confirme ses bons résultats dû
à ses 30 % (colonne 6). Au contraire, la Norvège et la Suède avec 37 % et 36 %
les infirmes, voir ils font aussi moins bien que la France, qu’on a reconnu
très ségrégationniste avec 52 %. Y-t-il un effet maître qui pourrait expliquer
cela ?
Maintenant,
on va essayer de voir s’il y a une ségrégation sociale et la comparer entre les
pays nordiques, avec un point de fixation sur la France pour pouvoir mieux se
projeter sur les chiffres.
Les
colonnes 7 à 10 se basent plus sur des caractéristiques personnelles des
élèves : la profession des parents (colonne 7), le sexe de l’élève
(colonne 8), la langue parlée à la maison, en distinguant étrangers et natifs
(colonne 9) et enfin le lieu de naissance des parents (colonne 10).
Pour
la langue parlée à la maison, les finlandais ont une ségrégation de 67%, la
Norvège de 45 % et la Suède de 53 %, enfin pour la France, elle est seulement
de 44 %. On peut expliquer le fort pourcentage de la Finlande sur le fait que
les minorités sont concentrées dans certaines zones du pays et donc moins dilué
que la France.
Mais
pour les professions des parents, la Finlande à 27 %, la Norvège et la Suède a
29 %. Ces résultats sont quasi semblables. Pour la France, son pourcentage est
de 34, donc légèrement plus, mais ce qui reste encore assez proche des pays
scandinaves.
En
conclusion, mon approche serait de dire que la ségrégation sociale joue un peu,
tandis que la ségrégation académique est plus importante pour la France, mais
celle-ci a des résultats quasi-équivalent à la Norvège et la Suède dans les
colonnes allant de 11 à 13, pourtant ceux-ci sont moins ségrégationnistes
académiquement. M. Demeuse précise que « les données indiquent que les
systèmes qui pratiquent peu la ségrégation académique au niveau des écoles
enregistrent des différences sociales faibles (à ce sujet, voir aussi Monseur
& Crahay, 2008). Au contraire, les systèmes plus ségrégatifs d’un point de
vue académique tendent aussi à accroitre les différences de résultats entre les
groupes sociaux. » Il compare la Finlande avec l’Allemagne, où ces
résultats mettent en relief son approche (voir tableau, ci-dessus).
Bibliographie :
. Revue Française
de Pédagogie n°165 du 4ème trimestre 2008 ;

"Regards sur l'Éducatiion", 2008 OCDE Les sigles : |
||||||
a : données sans objet | w : données exclues à la demande du pays | |||||
m : données non disponiblbes | x : inclus dans une autre rubrique du tableau | |||||
PIB : Produit Intérieur Brut | ||||||
P 445 | Quel est le temps d'instruction obligatoire dans les établissements publics, | |||||
pour 2006 ? | ||||||
T1 | Tranche d'âge dans laquelle + 90 % de | Nbre annuel moyen d'heures d'instruction obligatoire | ||||
la population totale est scolarisée | 7 à 8 ans | 9 à 11 ans | 12 à 14 ans | 15 ans | ||
Finlande | 6 à 18 ans | 608 | 640 | 777 | 856 | |
France | 3 à 17 ans | 910 | 887 | 963 | 1033 | |
Norvège | 4 à 17 ans | 620 | 728 | 827 | 855 | |
Suède | 6 à 18 ans | 741 | 741 | 741 | 741 | |
PP. 446 | Quel est le temps d'instruction par matière en pourcentage du temps | |||||
et 447 | total d'instruction (2006) ? | |||||
T2 | Lecture | Mathématiques | Sciences | |||
9 à 11 ans | 12 à 14 ans | 9 à 11 ans | 12 à 14 ans | 9 à 11 ans | 12 à 14 ans | |
Finlande | 21 | 13 | 18 | 13 | 10 | 17 |
France | 31 | 16 | 18 | 15 | 5 | 13 |
Norvège | 23 | 16 | 15 | 13 | 7 | 9 |
Suède | 22 | 22 | 14 | 14 | 12 | 12 |
P. 461 | Quel est le nombre d'élèves/étudiant par enseignant (2006) ? | |||||
T3 | Secondaire | |||||
Préprimaire | Primaire | 1er cycle | 2ème cycle | |||
Finlande | 12 | 15 | 9,7 | 15,8 | ||
France | 19,3 | 19,3 | 14,1 | 9,7 | ||
Norvège | m | 10,9 | 10,2 | 9,7 | ||
Suède | 11,4 | 12,1 | 11,4 | 13,8 | ||
P. 477 | Quel est le salaire des enseignants après 15 ans d'exercice, et | |||||
quel est le % par rapport au PIB par habitant ? | ||||||
T4 | Secondaire | |||||
Primaire | % PIB | 1er cycle | % PIB | 2ème cycle | % PIB | |
Finlande | 35 798 | 1,09 | 38 269 | 1,17 | 42 440 | 1,3 |
France | 31 366 | 1,01 | 33 846 | 1,09 | 34 095 | 1,1 |
Norvège | 34 917 | 0,67 | 34 917 | 0,67 | 37 626 | 0,72 |
Suède | 30 782 | 0,88 | 31 565 | 0,91 | 34 086 | 0,98 |
P. 233 | Quelles sont les dépenses annuelles par élève/étudiant au titre des | |||||
établissements, tous les services confondus (2005), et % PIB par habitant ? | ||||||
T5 | Secondaire | |||||
Primaire | % PIB | 1er cycle | % PIB | 2ème cycle | % PIB | |
Finlande | 5 557 | 18 | 8 875 | 29 | 6 441 | 21 |
France | 5 365 | 18 | 7 881 | 27 | 10 311 | 35 |
Norvège | 9 001 | 19 | 9 687 | 20 | 12 096 | 25 |
Suède | 7 532 | 23 | 8 091 | 25 | 8 292 | 25 |
Quelle est la répartition des effectifs scolarisés dans le 2ème cycle, | ||||||
selon les filières d'enseignement public et privé (2006) ? | ||||||
T6 | Général | Profession. | Total en % | |||
Finlande | 35 | 65,4 | 100 | |||
France | 57 | 43,1 | 100 | |||
Norvège | 40 | 60 | 100 | |||
Suède | 45 | 55,1 | 100 | |||
P. 362 | Quel est le taux de scolarisation, selon l'âge (2006) ? | |||||
T7 | Age fin obligation | Groupe âge de | ||||
scolaire | + 90 % scolarisé | |||||
Finlande | 16 |
6-18 ans | ||||
France | 16 |
3-17 ans | ||||
Norvège | 16 |
4-17 ans | ||||
Suède | 16 |
6-18 ans | ||||
P. 365 | Quels sont les effectifs selon le type et le mode de scolarisation (2006) ? | ||||||||
T8 | Public | Privé | Privé | Public | Privé | Privé | Public | Privé | Privé |
subvent. | subvent. | subvent. | |||||||
par l'État | Indép. | par l'État | Indép. | par l'État | Indép. | ||||
Finlande | 96,7 | 1,3 | a | 95,9 | 4,1 | a | 85,9 | 14,1 | a |
France | 85 | 14,5 | 0,5 | 78,6 | 21,1 | 0,3 | 69,6 | 29,5 | 0,9 |
Norvège | 97,7 | 2,3 | x | 97,2 | 2,8 | x | 91,4 | 8,6 | x |
Suède | 93,5 | 6,5 | n | 92,4 | 7,6 | n | 91,2 | 8,8 | n |
ZERAIBI Akim